Les différents types de motorisation pour les avions

La motorisation est un élément très important pour un avion. En effet, ses performances opérationnelles en dépendent fortement.

Par exemple, un avion dont les moteurs ne seraient pas assez puissants ou fiables, ou consommeraient trop, aurait les plus grandes difficultés opérationnelles.

En outre, il y a certains types de mission qui sont aujourd'hui impossibles à réaliser. Une des raisons est qu'il n'existe pas de moteurs adaptés et suffisamment performants. L'avion supersonique civil en est une illustration parfaite ! (Même s'il y a aussi d'autres bonnes raisons pour ne pas développer aujourd'hui ce genre d'avion... comme la question du bang sonique.)

Vue d'ensemble

Nous pouvons identifier principalement 3 types de motorisation :

  • les moteurs à pistons,

  • les turbopropulseurs, que l'on appelle souvent "turboprop",

  • les turbofans

« D'accord, mais quelle est la différence entre eux ? »

Il y en a plusieurs. Mais commençons par regarder les différences en terme d'apparence. Voici 3 avions, chacun équipé d'un type de motorisation.

Voici des moteurs à pistons.

Nous pouvons le reconnaître car c'est un moteur à hélice et le nombre de pales[1] est en général de 2, parfois 3 mais très rarement (voire jamais) plus. Les entrées d'air sont de dimension réduite, et surtout utiles pour refroidir le moteur. Les échappements aussi sont de petite dimension.

Voici de plus près les entrées d'air du moteur permettant le refroidissement du moteur et des cylindres que l'on distingue sur la photo, ainsi que le pot d'échappement en dessous.

De plus vous voyez que l'hélice de cet avion possède uniquement 2 pales.

Voici l'exemple d'un avion bi-moteur à pistons avec des hélices à 3 pales. Les entrées d'air rectangulaires de chaque côté du cône d'hélice servent à refroidir le moteur.

Voici deux avions équipés de moteurs de type turboprop. Par abus de langage, on dit fréquemment que ces avions sont des "turboprop".

« Nous avons ici aussi 2 avions avec des hélices. Comment les distingue-t-on des moteurs à pistons ? »

D'abord visuellement, nous trouverons en général sur un turbopropulseur un nombre de pale plus grand que 2 (de 3 jusqu'à 8 pour l'A400M par exemple). La confusion peut donc être faite pour les moteurs ayant 3 pales. Les autres éléments qui permettent de faire la différence sont l'entrée d'air et l'échappement de plus grandes dimensions.

Enfin, le principe de fonctionnement n'est pas du tout le même mais nous y reviendrons un peu plus tard.

ATR42-300 et Beech 200

Voici de plus près, un avion bi-turbopropulseur où l'on distingue

la grande entrée d'air (sous l'hélice) nécessaire à l'alimentation de la turbine et

les tuyères d'éjection des gaz sur les côtés (l'équivalent du pot d'échappement pour le moteur à piston).

Voici un A350-900 qui est équipé de 2 moteurs de types turbofan. De même, par abus de langage, on peut être amené à dire que cet avion est un "turbofan".

Airbus A350-900

Principes de fonctionnement

Le but de ce cours n'est pas de faire un exposé exhaustif de moteur. Nous n'allons donc pas rentrer trop dans les détails ni décrire toutes les variantes technologiques qui existent. Par contre, c'est important que vous soyez conscients de leurs principes de fonctionnement ainsi que de leurs différences afin de mieux comprendre le lien entre le type d'avion et sa mission.

Les moteurs à piston

Pour commencer par ce qui est le plus familier pour vous, parlons d'abord des moteurs à piston.

Pour faire vite, le fonctionnement est identique à celui des moteurs présents sur les voitures. Bien sûr, ils sont adaptés pour pouvoir être montés sur avion et fonctionner correctement en vol mais le principe est le même.

Le moteur est composé de plusieurs cylindres à l'intérieur desquels les pistons alternativement compriment un mélange d'air et de carburant puis sont repoussés par la combustion de ce mélange. Ils entraînent un axe appelé vilebrequin qui ensuite entraîne l'hélice de l'avion.

Je vous propose de regarder les 3 vidéos suivantes, proposées par Deutz et Pratt & Whitney, afin d'avoir une meilleur vision de la description et du fonctionnement d'un tel moteur.

Description (Youtube, 3 min 12s) : https://youtu.be/W2eILCrW53M

Fonctionnement (Youtube, 1 min 39s) : https://youtu.be/2QB7XPMeLnA

Avec les moteurs en étoile (Youtube, 4 min 33s) : https://youtu.be/EyPvpdy4dgg

L'hélice de l'avion, comme un ventilateur, aspire l'air se trouvant devant l'avion, l'accélère et l'expulse à une vitesse plus grande vers l'arrière, ce qui créé la poussée du moteur.

Les turbofans

Les turbofans

Avant de parler des turbopropulseurs (dont le fonctionnement interne est similaire à celui d'un turbofan), nous allons d'abord parler des turbofans.

Ici, le principe de fonctionnement est radicalement différent d'un moteur à piston même si, pour obtenir la poussée, il reste nécessaire de brûler du carburant. Pour cela, il faut aussi comprimer l'air, le mélanger au carburant et récupérer l'énergie de la combustion pour créer la poussée.

« Veuillez nous excuser mais nous avons vraiment l'impression que vous nous parlez d'un moteur à piston ! »

Je m'en rend bien compte. Ce qui va différencier le turbofan d'un moteur à piston, c'est la manière de comprimer l'air et de récupérer l'énergie libérée par la combustion. Dans un moteur à piston, la compression se fait dans un cylindre fermé et la combustion se fait coup par coup. Dans un turbofan, tout se fait de manière continue. L'air n'est jamais bloqué et ne fait que traverser le moteur. C'est au cours de cette traversée que tout se passe.

Je vous propose donc de regarder d'abord ces vidéos. Elles illustrent particulièrement bien le fonctionnement des moteurs turbofans :

  1. Présentation du fonctionnement du CFM56-5B (Youtube, 3 min 20s) : https://youtu.be/7TvGznjGv2Q

    Nous pouvons y voir :

    Le fan : de la 41e à la 46e seconde,

    Les compresseurs (basse pression à gauche et haute pression à droite) : de la 49e à la 58e seconde,

    La chambre de combustion : de la 59e seconde jusqu'à 1min 6s,

    Les turbines (haute pression à gauche et basse pression à droite) : de 1min 8s à 1min 20s,

    Le conduit d'éjection : de 1min 21s à 1min 26s,

    Les axes reliant les turbines et les compresseurs : de 2min 37s à 2min 50s,

    Les flux primaire et secondaire : de 1min 29 à 1min 43s.

  2. Présentation du fonctionnement du CFM56-7 (Youtube, 3 min 20s) : https://youtu.be/_LaKlE2h3Jw

  3. Présentation du fonctionnement du LEAP56, avec les particules d'air qui voyagent dans le moteur (Youtube, 3 min 56s) : https://youtu.be/kz5kv0RfeUc

  4. Présentation (plus longue !) du GEnx par General Electrics (Youtube, 13 min 40s) : https://youtu.be/zy4A-z2WKhw

Décrivons ce qui se passe dans un turbofan.

Considérons donc l'air qui rentre dans le moteur. Il est quasi immédiatement divisé en 2 flux : le flux froid et le flux chaud.

  • Le flux froid (ou flux secondaire) ne passe pas dans les parties chaudes du moteur mais est accéléré par le fan (le fan est l'hélice que l'on peut voir quand on regarde dans l'entrée d'air d'un turbofan. On l'appelle aussi la soufflante). Le flux froid constitue d'ailleurs la plus grande partie du flux traversant le moteur. Environ 80% de la poussée est créée par ce flux...

  • Le flux chaud (ou flux primaire), lui, passe dans le cœur du moteur. Dans cette traversée, il va d'abord passer au travers d'un premier compresseur (le compresseur basse pression - "BP") puis d'un deuxième compresseur (le compresseur haute pression -"HP") avant d'arriver dans la chambre de combustion où, le carburant est injecté et le mélange immédiatement brûlé. Le flux chaud (qui est à ce moment à plus 1000°C) est alors très fortement accéléré et pénètre dans la turbine haute pression puis dans la turbine basse pression et ressort enfin du moteur pour être éjecter par la tuyère vers l'arrière et se mélanger au flux froid qui l'entoure.

Compte tenu de son fonctionnement, nous voyons que les quantités d'air qui passent toutes les secondes dans chaque flux sont des paramètres importants. C'est pour cette raison que nous utilisons la définition ci-dessous.

DéfinitionTaux de dilution ou By Pass Ratio

Nous appelons taux de dilution (ou By Pass Ratio) le rapport entre le débit du flux froid et le débit du flux chaud. Les débits peuvent par exemple être mesurés en Kg/s

\(TauxDeDilution = BPR = \frac{debit_{froid}}{debit_{chaud}}\)

Le taux de dilution est un paramètre très important du moteur car il est directement relié à son efficacité et sa consommation de carburant. Nous aurons l'occasion d'en reparler plus tard.

RemarqueMoteur simple ou double-flux

Le fonctionnement que nous venons de décrire est celui d'un moteur double-flux. Il existe aussi des moteurs simple-flux (seul le flux primaire existe et le taux de dilution est égal à zéro) dont le fonctionnement est similaire à ce que l'on vient de décrire. Cependant ce genre de moteur, s'il a des performances très élevées (comme la poussée), a tendance à consommer significativement plus et à faire beaucoup plus de bruit qu'un moteur double-flux. C'est pourquoi aujourd'hui, les simple-flux sont réservés à des applications militaires et qu'on ne les trouve plus pour les applications civiles

Comment les compresseurs compriment-ils ?

« Si nous revenons au fonctionnement du turbofan, comment est-il possible aux compresseurs de comprimer l'air ? Quand on gonfle la roue d'un vélo ou un ballon, on se rend bien compte qu'il faut de la force pour y arriver ! »

C'est une bonne question ! En effet, si on repense au moteur à piston, un piston peut comprimer l'air se trouvant à l'intérieur de son cylindre parce qu'il est entraîné par le vilebrequin qui lui-même est entraîné par les autres pistons. Pour résumer, un piston utilise une partie de la force produite dans les autres cylindres pour comprimer l'air se situant dans le sien.

Dans un turbofan, le fonctionnement est différent mais les compresseurs ont quand même besoin de prendre de l'énergie quelque part pour avoir la force de comprimer l'air. C'est pour cette raison qu'ils sont mécaniquement reliés aux turbines par l'intermédiaire d'axes. Pour être plus précis :

  • le compresseur BP est relié à la turbine BP par un axe de rotation central et

  • le compresseur HP est relié à la turbine HP par un deuxième axe.

Les turbines étant entraînées par le flux chaud sortant de la chambre de combustion, on utilise une partie de cette énergie pour comprimer l'air qui rentre et ainsi assurer le fonctionnement du moteur.

« Vous êtes en train de nous dire qu'il y a 2 axes qui tournent dans un turbofan ! ! ? Pourtant, dans les vidéos ci-dessus, nous n'en voyons qu'un ! ? »

C'est l'impression que vous pouvez avoir parce que l'un des 2 axes est creux (c'est comme un tube) et le deuxième y tourne à l'intérieur. De l'extérieur, on ne voit donc qu'un seul axe mais il faut savoir que l'autre est à l'intérieur !

  • l'axe extérieur est celui reliant le compresseur et la turbine HP, et

  • celui à l'intérieur relie les BP.

Nous voyons donc qu'il y a 2 parties mobiles principales à l'intérieur d'un turbofan constituées chacune :

  • d'un compresseur,

  • d'une turbine,

  • d'un axe les reliant

Un tel ensemble s'appelle un corps. On parle alors de corps BP et de corps HP. Un moteur ayant 2 corps est un double-corps. Il existe aussi des moteurs simple-corps ou encore triple-corps.

Chacun de ces corps tourne à une vitesse qui lui est propre. Dans certains turbofans, ce sont ces vitesses qui sont pilotées par les systèmes de contrôle du moteurs. Ce sont les paramètres de fonctionnement N1 et N2 qui sont en particulier affichés dans le poste de pilotage afin que les pilotes puissent vérifier le bon fonctionnement des moteurs.

Et le fan ?

« Vous nous avez dit que 80% de la poussée est créée par le flux froid mais celui-ci ne fait que traverser le fan... Je ne comprends pas comment le fan est lui-même entraîné ! »

Il est lui aussi attaché au compresseur BP (et donc à la turbine BP !). Il utilise donc l'énergie de cette dernière pour aspirer l'air au niveau de l'entrée d'air et le propulser vers l'arrière un peu comme le ferait une hélice...

Les turbopropulseurs

Les turbopropulseurs

Les turbopropulseurs ont un fonctionnement interne similaire à celui d'un turbofan. La principale différence est que le flux chaud ne génère "aucune" poussée (ou disons plutôt une poussée très faible) et que toute la puissance créée est transmise à une hélice (entraînée par une turbine). Le fonctionnement "externe" est celui d'une hélice.

Je vais vous épargner ici un descriptif détaillé. Je vous propose plutôt de regarder les 2 vidéos explicatives suivantes, publiées par Pratt & Whitney. Si vous avez compris le fonctionnement d'un turbofan, vous comprendrez immédiatement celui d'un turboprop.

  1. Fonctionnement d'un PT6 (YouTube, 1 min 15s) : https://youtu.be/MiFNUIifWd4

  2. Écorché d'un PT6 (YouTube, 1 min) : https://youtu.be/tAThLeX8Tt4

Faites une pause à la 9e seconde et lisez ce qui suit :

  • L'air rentre, après avoir contourné le moteur par l'entrée d'air (non représentée), par la partie droite et traverse le compresseur (en violet) - Notez le compresseur centrifuge qui va pousser l'air autour de la chambre de combustion.

  • L'air pénètre ensuite dans la zone rouge par la chambre de combustion où il va être mélangé au carburant, brûlé et éjecté au travers de 2 turbines avant de sortir du moteur par les échappements non représentés.

  • La première turbine (celle de droite) est liée au compresseur.

  • La turbine de gauche, elle, est liée à un ensemble d'engrenages à train épicycloïdal (dans la zone verte) qui permettent de réduire la vitesse de rotation avant d'entraîner l'hélice.

Son fonctionnement nécessite une entrée d'air de grande dimension !

Aspiration et éjection : DANGER !

Attention

Nous avons vu que, de manière générale, les hélices ou le fan aspirent l'air se trouvant devant eux et l'éjectent vers l'arrière. Il faut donc faire très attention quand ils sont en fonctionnement et a fortiori au sol. Les aéroports font donc très attention à ces problèmes.

Si vous regardez les aires de parking dédiés aux avions, il y a des marques au sol afin d'identifier des zones qui doivent rester vides (surtout à l'avant des moteurs) ou des murs de protection vers l'arrière permettant de réduire l'effet du souffle ou d'éviter les projections dangereuses.

Voici 2 vidéos illustrant ces problématiques :

Les taxiways sont aussi conçus pour éloigner suffisamment les avions en mouvement des zones de stationnement. Les abords de ces mêmes taxiways sont aussi bien entretenus afin d'éviter la projection (ou l'ingestion) par les moteurs d'objets pouvant s'y trouver.